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Souplesse à la seconde : brisons le mythe

Vous êtes des milliers de danseurs amateurs à chercher sur Internet comment améliorer vos écarts à la seconde (= écart facial). Cette question revient en permanence sur les forums spécialisés, et la réponse la plus fréquente est malheureusement celle-ci :

« Pour améliorer ton écart facial, met toi à plat dos, fesses contre un mur, jambes élevées à 90°, écarte les à la seconde et laisse-les descendre par la seule force de la gravité. »

En image :

(ce n'est pas moi sur la photo)

Beaucoup de gens conseillent de rester dans cette position pendant un long moment (20, 30 minutes), avec un bon bouquin ou une émission de télé.

Cet exercice est tellement présent dans les esprits qu’il est temps pour moi d’essayer de casser le mythe.

Cherchons d’abord à décrire ce qui se passe :

Il s’agit d’un exercice de souplesse passive. Le poids des jambes va tirer sur les muscles de l’intérieur des cuisses. Entre le début et la fin de l’ « exercice », on constate généralement que nos jambes se sont rapprochées de quelques centimètres du sol.

Mais, regardons de plus près ce qui se passe réellement lorsque vous le faites chez vous.

Trois raisons de se méfier :

1. une progression illusoire

J’imagine que l’exercice est généralement effectué à froid chez vous. Vous venez de finir vos devoirs assis à votre bureau et vous vous dites, « tiens je vais me détendre 1/2h devant la télé »… Il est donc normal que les jambes descendent puisqu’elles vont effectivement se « réveiller » et se détendre par rapport à leur raideur au repos. Vous ne gagnez donc pas en souplesse, vous avez simplement réveillé votre potentiel une fois échauffé.

2. un risque de blessure démultiplié

Tout exercice de souplesse fait à froid donne une information importante au cerveau : il est très intelligent ! Sentant une tension anormale, il va automatiquement envoyer le signal inverse dans vos muscles pour tenter de les protéger de l’agression, ce qui résulte en un resserrement des fibres musculaires. Cet exercice vous fait donc forcer sur des fibres qui crient leur désaccord !

Lamp Une expérience récente a montré que quand un danseur croit s’échauffer avant un cours de danse en tentant un écart à la seconde, il va réduire ses capacités d’allongement musculaire pendant 30 minutes, le temps que s’apaise le signal nerveux de défense. Autrement dit, il aura gâché sa barre !

Vous devinez normalement la conséquence logique : un risque de blessure démultiplié. J’ai emprunté la photo ci-dessus à une blogueuse qui partage ses « conseils » de souplesse, et savez-vous ce qu’elle a précisé sous la photo ? « However, I hurt my hip flexor after that, I think it was because I might have done it too much and put too much pressure on it » c’est à dire « Cependant, je me suis blessée au fléchisseur de la hanche après [cet exercice], je pense que je l’ai peut-être trop fait et que j’ai trop forcé dessus ». Permettez-moi de dire que je trouve ça pathétique de la part de cette jeune femme !

3. un travail déséquilibré :

Si tout n’est pas à jeter dans la souplesse passive, celle-ci doit toujours être équilibrée par des exercices de souplesse active. En souplesse passive, le corps ne fait pas d’effort, on lui impose une force extérieure. A aucun moment il ne se muscle. La souplesse active est faite pour permettre d’acquérir les muscles nécessaires à TENIR les positions en extension. Nombreux sont les élèves qui ne comprennent pas pourquoi ils sont capables de faire un écart avant/arrière mais incapable d’atteindre la position écart dans un grand jeté. La réponse est simple, c’est purement une question de force.

Conclusion :

Il est temps de prendre du recul et de travailler nos corps correctement, dans le RESPECT. Je pense que vous gagneriez à arrêter totalement de faire cet exercice chez vous. Faites-le à la fin d’un cours de danse, ou juste après la barre, c’est là que vous optimiserez son efficacité car votre corps sera prêt (tant que vous le faites dans la détente, sans aucune crispation).

Comme vous, j’ai essayé cet exercice. Avez-vous remarqué la douleur intense que nous ressentons lorsque nous quittons la position et reserrons nos jambes ? Trouvez-vous normal, et sain, de ressentir une telle douleur ? Ma réponse est non, absolument pas. On vous fait croire que votre corps va s’habituer à une plus grande souplesse dans cette position alors que je le soupçonne de n’enregistrer qu’une sensation de douleur.

Computer Restez connectés ! Prochainement je partagerai avec vous des exercices pour compenser l’absence de celui-ci Laugh